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Dépistage des morts subites : analyse médico économique

Cette thèse propose une évaluation du ratio coût-efficacité du dépistage de la mort subite chez le jeune sportif en France, à partir de l’adaptation des données de la littérature internationale.

La mort subite du jeune sportif est un événement rare et dramatique. Ces dernières années, plusieurs sociétés savantes se sont prononcées pour ou contre le dépistage des cardiopathies à risque par un électrocardiogramme (ECG).

Les arguments échangés concernent les coûts engendrés par le dépistage, les performances de l’ECG, la fréquence des pathologies et l’incidence de la mort subite, les risques spécifiques à certaines populations, l’efficacité de la disqualification et du traitement des pathologies… Autant d’arguments qui peuvent être synthétisés sous forme d’un ratio coût-efficacité. Aux États-Unis, une intervention médicale est considérée comme efficiente en dessous de 50 000 dollars par année de vie sauvée.

La revue de littérature recense dix articles estimant le rapport coût-efficacité de l’ECG en prévention de la mort subite du jeune sportif : cinq modèles théoriques et cinq études prospectives. Ces articles sont principalement issus de l’étranger: seuls deux d’entre eux sont européens. Les prix pratiqués à l’étranger peuvent être élevés: jusqu’à 754 dollars pour une échocardiographie. Les résultats de chaque article ont été recalculés en utilisant les coûts équivalents en France.

Avant les calculs, quatre des dix études ont un résultat sous le seuil d’efficience de 50 000 dollars par année de vie sauvée. Après adaptation aux coûts français, huit des dix études ont un résultat inférieur à ce seuil.

En France, le dépistage aurait donc vraisemblablement un rapport coût-efficacité acceptable en référence au seuil américain.

Le graphique ci-dessous synthétise ces résultats :

Dans les articles recensés, l’ECG est réalisé une seule fois dans la carrière du sportif. Les recommandations françaises et européennes impliquent la répétition du dépistage, ce qui entraînerait une forte augmentation des coûts. Pour préserver l’efficience du dépistage, nous proposons de cibler les populations à risque, comme développé dans l’arbre décisionnel ci-dessous :

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Dépistage de la mort subite chez le jeune sportif en France, analyse médico-économique.

Thèse pour le diplôme d’État de Docteur en Médecine présentée et soutenue publiquement à Lille le 1er mars 2016 par Loïc Dupire. Jury : Professeur D. Lacroix, Professeur J.-M. Lefebvre, Docteur D. Montaigne et Docteur P. Bacquaert (Pdf : 82 pages, 2.1 Mo – Licence : © Reproduction interdite / A usage personnel uniquement).

Commentaires des membres du Jury lors de la soutenance

La mort subite est une définition administrative qui est « une mort immédiate en s’écroulant » (jargon populaire).

La mort subite du sportif de haut niveau est aussi une définition administrative car comment définir le haut niveau autrement que par le niveau et non le temps de pratique.

L’ECG peut amener un dépistage utile encore faut-il pouvoir l’interpréter et connaître la somme de maladies génétiques rares qui peuvent occasionner avec forte probabilité une mort subite.

L’exclusion d’un sportif suite à un ECG anormal est du domaine du spécialiste cardiologie et même plus du rythmologue et du généticien. A noter les progrès des prises en charge avec les défibrillateurs implantables et la santé connectée.

Avoir un ECG négatif à 16 ans ne préjuge en rien sur la découverte future d’une anomalie quelques années plus tard, le dépistage unique proposé peut donc être faussement rassurant.

On a plus de « chance » de mourir au repos qu’à l’effort aussi il ne faut pas stigmatiser le sport qui est bon pour la santé.

Le collège des enseignants de médecine générale recommande de réaliser un ECG pour confirmer un trouble du rythme afin de faciliter la mise en place d’une prise en charge spécialisée.

Les défibrillateurs automatisés implanté dans les stades serviront plus aux spectateurs qu’aux sportifs et une promotion de la bonne prise en charge initiale réduira le taux de survie avec le minimum de séquelle, il ne faut pas relâcher les efforts de formations car la vie dépend de la bonne réaction du premier témoin. Pour être utile un défibrillateur doit être installé sur les lieux d’habitations et non dans les agences bancaires ou autres car les accidents cardiaques ont une forte probabilité de survenir au domicile et le soir.

Lors d’une mort subite si l’autopsie n’est pas possible faire une autopsie biologique et génétique.

En définitive le certificat de non contre-indication à la pratique des sports garde toute son utilité mémé si aucun ECG n’est réalisé et c’est surtout la bonne connaissance des antécédents personnels et familiaux qui peut orienter vers une prise en charge cardiologique qui ne doit pas être systématique mais en lien avec ces antécédents (NDLR : un décret précise depuis le 1er septembre 2016 les conditions de suppression du certificat médical annuel de non contre-indication à la pratique des sports et le remplacement par le certificat médical attestant de l’absence de contre-indication à la pratique du sport (CACI) tous les trois ans.).

Le Professeur Dominique Lacroix, Président du Jury, conseille le maintien de la visite médicale qui s’inscrit dans un acte de santé publique mais conseille une prise en charge dans un centre de référence pluridisciplinaire dès qu’une suspicion de mort subite est dépistée ou après mort subite récupérée, comme par exemple le CREMS du CHRU de Lille.

Bon à savoir

En France, la mort subite de l’adulte, ou arrêt cardiaque, fait environ 40 000 victimes par an. Elle touche le plus souvent des personnes relativement jeunes et le taux de survie ne dépasse pas actuellement 3%, alors qu’il atteint 15 à 20% à Seattle par exemple. Dans 90% des cas, la mort subite a pour origine un trouble cardiovasculaire principalement au décours (parfois immédiat) d’un infarctus du myocarde. En Ile-de-France, 3 500 personnes sont concernées chaque année. Parmi elles, 450 sont prises en charge dans les services de réanimation et seules 150 survivent (Source : Inserm).

Mort Subite et défibrillation en accès public dans les communes du Nord

L’engagement des communes du Nord dans la prise en charge de la mort subite est fort. Cependant, des améliorations seraient à apporter notamment en matière d’accessibilité des appareils. De même, bien que le taux d’initiations proposées aux habitants soit satisfaisant, la fréquence des formations fait parfois défaut.

Le Nord reste l’un des départements précurseurs dans la prise en charge de la mort subite et l’accès public à la défibrillation. Le bénéfice en termes de santé publique est réel à faible échelle notamment chez le sportif. Pour que ce bénéfice soit retrouvé en population générale, il est nécessaire d’adopter de nouvelles stratégies. La création d’un Centre Régional d’Expertise de la Mort Subite devrait permettre d’atteindre cet objectif.

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Mort Subite et défibrillation en accès public dans les communes du Nord : état des lieux.

Thèse pour le diplôme d’État de Docteur en Médecine présentée et soutenue publiquement à Lille le 7 avril 2014 par Hélène Boulanger (Pdf : 73 pages, 400 Ko – Licence : © Reproduction interdite / A usage personnel uniquement).

Mort subite au cours des activités physiques et sportives.

L’étude par l’Académie nationale de médecine de la mort subite au cours des activités physiques et sportives a pour objectif essentiel de contribuer par des mesures préventives à limiter le nombre de personnes exposées à ce drame. Elle s’inscrit dans le suivi du Rapport « La lutte contre le dopage : Un enjeu de santé publique », adopté par l’Académie nationale de médecine le 5 juin 2012 et plus particulièrement de la deuxième recommandation de ce Rapport : « Mettre en place un observatoire des accidents et complications liés au dopage. L’Académie demande que tout décès sur un terrain de sport soit obligatoirement suivi d’une autopsie comportant un examen anatomo-pathologique, toxicologique et génétique ».

C’est dans ce contexte que le Conseil d’Administration de l’Académie nationale de médecine a proposé de poursuivre une réflexion visant à proposer qu’une autopsie soit obligatoire en cas de mort subite au cours d’activités physiques et sportives, avec recommandations pour des mesures préventives.

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Mort subite au cours des activités physiques et sportives : recommandations pour des mesures préventives.

Rapport à l’Académie nationale de médecine publié le 1er octobre 2013 par Patrice QUENEAU, Michel Rieu, Dominique Lecomte, Jean-Pierre Goullé, Vincent Probst, Xavier Jouven (Pdf : 12 pages, 90 Ko – Source : www.academie-medecine.fr).

Le rôle essentiel du Premier Témoin

Les nouvelles recommandations sur l’arrêt cardiaque, basées sur une évaluation plus rigoureuse des données, rappellent que l’amélioration de la survie dépend beaucoup de la prise en charge initiale.

« Il est essentiel que le premier témoin effectue les bons gestes, a souligné le Dr Pascal Cassan, car c’est l’interaction entre le premier témoin et les services de prise en charge des urgences qui conditionne pour beaucoup la survie ». L’algorithme de prise en charge a donc encore été simplifié afin d’en faciliter la mémorisation et donner confiance au témoin, qui est très souvent un membre de la famille ou un collègue de travail.

Il est ainsi préconisé, face à un sujet inconscient et ne respirant pas, d’appeler immédiatement les secours – directement ou avec l’aide d’un autre témoin -, avant de libérer les voies aériennes supérieures et de réaliser 30 compressions thoraciques, suivies de deux insufflations. Les recommandations précisent que cette réanimation doit être débutée même en cas de doute face à une personne qui s’effondre et ne réagit plus, car le fait de masser à cœur battant n’est pas délétère.

Cette séquence 30 compressions/deux insufflations à un rythme de 100 à 120/minute (soit 2 compressions par seconde) est poursuivie jusqu’à l’arrivée d’un défibrillateur automatique externe, en minimisant les interruptions afin de limiter les périodes de « no-flow ».

Si le témoin ne se sent pas capable de réaliser les insufflations, il doit se concentrer sur les compressions. Les mains doivent être positionnées au tiers inférieur du sternum, en plaçant la main dominante au centre de la poitrine et en positionnant l’autre main par-dessus doigts croisés afin de réduire le risque de lésions des côtes. La profondeur des compressions doit être de l’ordre de 5 cm (sans dépasser 6 cm), en respectant idéalement le relâchement passif du thorax.

Autre contexte, celui de la population pédiatrique, où les arrêts cardiaques sont rares et plus complexes à étudier. Le diagnostic est difficile, donc il importe de débuter la réanimation après une évaluation rapide en l’absence de signe de vie. Chez les nourrissons, les causes ventilatoires prédominent : il faut ainsi commencer par 5 ventilations après avoir vérifié la perméabilité des voies aériennes supérieures, rechercher à nouveau des signes de vie puis poursuivre dans l’attente des secours au rythme de deux ventilations/15 compressions (au mieux à deux pouces, sinon à deux doigts chez le moins d’un an, à une ou deux mains chez les plus grands). Chez les adolescents, les recommandations de l’adulte s’appliquent (Source : par le Dr Isabelle Hoppenot pour Le Quotidien du Médecin, le 15.02.2016).