S’étirer comme il faut quand il faut

La Bobologie au quotidien, aux Editions IRBMS

S’étirer comme il faut quand il faut

L’efficacité des étirements est actuellement remise en cause par certains cadres techniques ou scientifiques. Cette polémique a malheureusement pour effet de déstabiliser les sportifs qui ne savent plus à quel saint se vouer.

Il nous parait intéressant de revenir sur des données fondamentales qui justifient les différentes méthodes d’étirement, et d’orienter notre analyse sur les réels bénéfices que vous pouvez en tirer. Mais encore faut-il s’interroger : « efficaces sur quoi ? ».
Si l’on vous dit « étirez vous, vous allez courir plus vite ! ». Voila qui en ferait sourire plus d’un ! Et pourtant…
En dehors de l’effet de récupération bien connu, certains étirements présentent une efficacité réelle sur l’amélioration du niveau de performances.

DIFFERENTS TYPES

a) Conseils préliminaires :
Certaines évidences sont bonnes à rappeler, car en pratique, elles ne sont pas toujours respectées.
Tout d’abord, une séance d’étirements doit toujours être précédée d’un échauffement. Les muscles doivent être chauds pour les préparer à s’allonger, améliorer leur élasticité. Si les étirements s’intègrent dans la phase d’échauffement, ils doivent être précédés d’une phase de footing, ou de quelques éducatifs. Un muscle froid n’est pas souple et se déchire, source de blessure.

Les mouvements type « en ressort » sont à proscrire, car ils engendrent des réactions réflexes qui sont à l’opposé des actions recherchées.

Les étirements doivent être indolores. Ce qui n’empêche pas qu’ils apportent une certaine sensibilité des muscles concernés, en rapport avec la tension exercée. Mais sensible ne veut pas dire douloureux.

S’y associe une respiration calme, les étirements s’inscrivant prioritairement sur la phase expiratoire. Le contexte doit être reposant, favorable à la concentration et à l’impact psychologique que nous aborderons plus loin.

b) Etirements Passifs ou actifs ?

– Les étirements passifs sont les plus connus et les plus pratiqués. Le principe est simple : le muscle étiré est au repos. L’étirement doit être d’une durée suffisante (1 minute). L’objectif est essentiellement la récupération.

– Les étirements actifs sont de différents types : L’une des théories repose sur le principe que le relâchement d’un muscle donné est favorisé par la contraction simultanée du muscle antagoniste, ceci par la mise en jeu d’un arc réflexe d’origine neurologique (myotatique). Ainsi, l’étirement des ischiojambiers sera amélioré par la contraction simultanée du quadriceps.

On distingue une variante que l’on peut appeler étirements tenso actifs, pour lesquels, le muscle étiré est lui même contracté. Voila qui peut paraître insensé, puisque la contraction musculaire entraîne obligatoirement un raccourcissement. C’est ce qui justifie une durée d’étirement suffisamment courte (10 à 15 sec) pour ne pas être traumatique. De plus, la contraction reste faible, et ne produit pas (ou peu) de déplacement du segment de membre. L’efficacité est surtout dans la préparation à l’effort, et la recherche de performance.

c) Etirements analytiques en chaîne ?

Les étirements analytiques sont de moins en moins pratiqués, tout au moins en pratique sportive.
Forcé de constater qu’il est exceptionnel qu’un geste sportif ne fasse appel qu’à un muscle isolé. De plus, la répétition des postures de chaque muscle étiré isolément rend la séance trop longue et fastidieuse.

Il faut en préférer à juste titre les étirements en chaîne musculaire globale, particulièrement indiqués dans les sports complets, le triathlon par excellence. Ils respectent un certain équilibre et une synergie d’action des muscles les uns par rapport aux autres.

A titre d’exemple, votre entraînement de cyclisme ne fait pas travailler que vos jambes et votre bassin. D’autres contraintes mécaniques apparaissent principalement au niveau du rachis, lombaire mais aussi cervical (d’autant plus que vous utilisez un prolongateur). La séance d’étirements ne doit pas se limiter aux membres inférieurs, mais doit s’étendre sur toute la chaîne postérieure jusqu’au cou, selon des exercices spécifiques.

Pour illustrer un autre exemple d’étirement global en chaîne, la posture photographiée ci-dessous est particulièrement indiquée en cyclisme, car elle permet un étirement des quadriceps, associés aux muscles latéro-thoraciques, aux épaules, et aux membres supérieurs. On peut facilement concevoir d’accorder une priorité relative au quadriceps à l’issue d’un entraînement vélo, vu le rôle moteur essentiel qu’il représente.

Mais il faut aussi garder à l’esprit que les épaules et les membres supérieurs, par leur point d’appui sur le guidon, participent à l’équilibre du vélo et à la transmission des forces. A l’inverse des autres (et nombreuses) postures d’étirement du quadriceps rencontrées dans certains guides, celle-ci permet d’intégrer une ouverture du thorax, de la ceinture scapulaire et des membres supérieurs, libérant ainsi les raideurs consécutives à cet effort, dans le respect de la spécificité de la discipline.

Cet exercice sera bien sûr associé à d’autres postures de la chaîne postérieure des membres inférieurs.

d) Préservez votre dos !

L’une des priorités reste l’attention particulière qui doit être portée sur la bonne position du rachis. Le risque traumatique est bien réel. Votre dos a déjà subi d’énormes contraintes lors de votre entraînement, ne lui en rajoutez pas une dose supplémentaire en vous étirant !

Le principe est simple : pour chaque position, demandez vous dans quelle position est votre dos ? Il doit toujours rester bien droit, éviter les cassures, les cambrures, les inclinaisons latérales mal contrôlées. Les rotations axiales sont autorisées, si elles s’accompagnent d’un allongement simultané de l’axe rachidien, avec un placement rigoureux du dos par rapport aux membres inférieurs. Ces rotations répondent à l’orientation diagonale ou spiralée de certaines fibres musculaires.

MODALITES DE REALISATION

Les conditions de réalisation des étirements sont essentielles à respecter. Non seulement, parce qu’elles conditionnent l’efficacité de la posture, mais également parce qu’elles peuvent devenir nocives si elles sont incorrectes.
Nous n’allons pas passer en revue les différentes postures à maintenir, ni les étirements spécifiques au triathlon. Ces données sont reprises par de nombreux manuels.

EFFICACITE PHYSIQUE DES ETIREMENTS

Les effets musculaires sont bien connus. L’allongement et la mobilisation des fibres, le développement des sarcomères (effet contesté), vont contribuer à développer la souplesse et l’amplitude du geste.
Au niveau des membranes tissulaires, les plans de glissements tissulaires seront plus fluides.

Les articulations sont également concernées avec une libération des tensions accumulées lors de l’effort, une restitution de la souplesse des membranes articulaires.
L’amélioration du drainage vasculaire facilite l’épuration des déchets musculaires, et augmente la pré charge cardiaque (retour sanguin) par le rythme respiratoire associé.

L’impact hormonal est directement palpable avec une sensation de bien être, favorisée par la libération des endorphines naturelles

La relaxation n’est pas seulement physique, mais aussi et avant tout psychologique.

PREPARATION PRE COMPETITIVE

L’augmentation de chaleur interne et l’activation des organes neuromusculaires sont des facteurs de préparation à l’effort. Mais rien ne remplace un échauffement bien conduit.

ETIREMENTS ET POSTURE

Les étirements modifient le tonus musculaire, c’est-à-dire les forces de traction qui déterminent votre posture et la position de votre squelette. Ils libèrent ainsi les contractures, corrigent les attitudes vicieuses, et rétablissent votre squelette dans une position correcte non traumatique.

C’est par exemple le cas très fréquent des bascules antérieures du bassin en rapport notamment avec une raideur du quadriceps et du psoas, qui tirent le bassin vers le bas sous l’effet de leur tonus. Des étirements adaptés centrés sur l’appareil extenseur associés à un renforcement musculaire de gainage abdominal vont rétablir le bassin dans une position plus adaptée, évitant ainsi des répercutions rachidiennes mal tolérées (cambrure lombaire).

UNE DIMENSION PSYCHOLOGIQUE QUI FAIT LA DIFFERENCE

Voila qui est moins évident à admettre, et nécessite une certaine ouverture d’esprit !
C’est dans ce domaine que les étirements actifs prennent toute leur importance.

Les contractions des muscles agonistes et antagonistes associées aux étirements doivent vous imposer une certaine concentration sur votre posture, et vous amener quelques questions : Quel niveau de contraction dois je imposer pour maintenir ma position ?

Dans quelle position, quelle orientation se trouve mes segments de membres ? Quels muscles me maintiennent en équilibre ? Pour une posture donnée, vous imposez à votre appareil locomoteur différentes forces (contractions relâchement). Essayez donc à saisir ce que votre corps vous renvoie comme information ?

Cette compréhension des postures, cette perception du degré d’allongement et de contraction (agoniste/antagonistes), ainsi que la prise de conscience de chaque muscle sollicité, vont vous permettre d’intégrer votre schéma corporel. Le principal bénéfice que vous allez en tirer, sera une meilleure coordination motrice, c’est-à-dire une meilleure coordination et répartition des charges entre les différents groupes musculaire, un geste sportif plus efficace, plus puissant, plus rapide, ou plus précis.

Le principal obstacle de cette technique, repose sur l’effort de concentration qui est loin d’être négligeable. Ces étirements ne peuvent s’effectuer « à la légère » et nécessitent de s’isoler dans une ambiance calme, pas toujours facile à obtenir aux entraînements.

Cette concentration devient positive en favorisant à la préparation mentale précompétitive.

UN ELEMENT DE PERFORMANCE – EXEMPLE

Rappelons avant tout que les étirements passifs réalisés avant l’effort diminuent le niveau de performance. Voila une notion qui n’est pas nouvelle, mais de nombreux triathlètes les pratiquent toujours, croyant bien faire. Seuls les actifs ou activo-passifs sont alors indiqués.

Coordination, amplitude, et posture, sont les principaux bénéfices des étirements qui agissent sur la performance.

Nous ne reviendrons pas sur la coordination, déjà décrite plus haut, et qui constitue un facteur essentiel de contrôle moteur.

L’effet sur l’amplitude du geste sportif est bien sûr un facteur de performance. Chercher loin devant la phase d’appui en crawl augmente l’amplitude de trajet moteur des bras et la force de propulsion. Allonger votre foulée aura incontestablement un effet positif sur votre vitesse…

En ce qui concerne la posture, je vous invite à regarder courir vos camarades, et en particulier à observer la position du bassin lors de la course. Certains courent le bassin figé, d’autres mobile.
Voila une notion déjà évoquée dans un article précédent sur le SGA.
Tout part de la constatation que pour augmenter la foulée, il faut propulser le bassin vers l’avant en accompagnant le pas antérieur.

Cette participation du bassin dans le pas de course, impose des compensations rachidiennes (tendance à la cambrure, rotation), qui diffusent vers le haut du corps jusqu’aux épaules, dont le mouvement de ballant participe également à la foulée, et à la stabilité du corps.

Assouplir vos muscles pelvi-trochantériens par des étirements actifs, va vous permettre de « mobiliser » votre bassin, et de l’intégrer dans votre foulée. Libérez vos pelvi-trochantériens pour courir plus vite !

Plusieurs positions permettent de libérer les tensions des pelvi trochantériens. Nous n’en décrirons qu’un exemple, qui présente l’avantage d’agir non seulement sur les muscles du bassin, mais également sur toute la chaîne musculaire postérieure, des mollets jusqu’aux dorsaux.

Position initiale : jambes légèrement écartées (80cm), les pieds regardant vers l’avant. Basculez les pieds, le droit de 90°, le gauche de 45°, ceci sans bouger votre bassin. Vous serez tenté de basculer votre bassin du coté de la jambe antérieure (pieds à 90°), mouvement attestant déjà d’une raideur des muscles pelvi-trochantériens, et contre lequel il faudra résister.

etirement

Puis tournez votre buste vers la droite, de façon à arriver perpendiculairement au plan initial, sans subir la bascule du bassin vers le bas (recul de la hanche droite). Le bassin doit regarder pleinement vers la droite, et rester horizontal sans s’abaisser (contraction simultanée des abdominaux). Puis, levez les bras vers le haut, coudes tendus, en accrochant vos mains (comme pour aller atteindre un objet situé très haut). Les épaules doivent être détendues.

etirement 2

Cet étirement est difficile à obtenir, alors ne vous attendez pas à obtenir la position finale le premier jour !

CONCLUSION

Les étirements passifs gardent un intérêt dans la récupération, par leurs effets sur l’amélioration de la souplesse, du drainage vasculaire, et la relaxation physique/psychologique

Mais il faut encourager la pratique des étirements actifs dans un objectif d’amélioration de vos performances, par leurs bénéfices sur la coordination motrice, l’adaptation de vos postures, le gain de souplesse, de vitesse, et d’efficacité du geste sportif.

Les étirements doivent être une séquence à part entière de l’entraînement, qui permet d’intégrer vos postures et votre geste sportif, tout en libérant certaines tensions source d’attitude vicieuse ou de traumatisme.

Raideur et laxité, facteurs de technopathies
Diaporamas Médecine du Sport
Raideur et laxité, facteurs de technopathies
Auteur(s) : Docteur Jacques GIRARDIER / Version : 2007
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