Entraîneurs, communiquez !


« Le mot juste est un agent très puissant. Lorsqu’on trouve un de ces mots qui conviennent parfaitement, l’effet produit est tant physique que mental, et incroyablement rapide » Mark Twain. Tous reconnaissent la place de l’entraîneur, du coach, dans les performances de l’athlète, de l’équipe. Si ses apports sur le plan technique et tactique paraissent déterminants, on occulte parfois la place centrale des mots, de la communication, de son discours sur la gestion de l’athlète et du groupe mais aussi de leur impact sur les résultats.

Nous avons tous des mécanismes mentaux que nous utilisons pour percevoir, évaluer, traiter l’information et décider. Ils sont le plus souvent « inconscient » et sont des organisateurs de nos perceptions et de nos moyens d’agir. Ils induisent notre façon de réagir et d’agir. Ce sont ce que certains appellent des « méta-programmes ». Dans un contexte donné, l’athlète aura des méta-programmes préférentiels pour se motiver et décider d’une action (Cf Fiche théorique). Voici quelques éléments sur la communication avant, pendant et après la compétition. Le discours veille de match : La préparation mentale se fait essentiellement la veille ou les jours précédents la compétition. Chaque athlète doit connaître son rôle et ses tâches à effectuer. Le coach peut ainsi questionner l’athlète sur cela : Comment peux-tu contribuer à ta réussite ? A quoi dois-tu prêter attention ? Qu’est-ce qui est particulièrement important de faire selon toi ? Objectif : rentrer dans la compétition, le responsabiliser. Pour cela : définitions des buts ? présentation du contexte général (adversaire, lieux..)

Le discours d’avant match :

Les athlètes mettent en place des routines qui leurs sont propres, routines souvent travailler avec le préparateur mental, le coach..Les routines sont différentes selon les joueurs.

Lizarazu : « Je me pose, j’essaie de faire le vide dans ma tête ».

Dessailly : « J’essaie de me détacher, de penser à autre chose. Je bouge, je parle..J’adopte toutes sortes de comportements qui me permettent de relativiser. »

Djorkaeff : « Me poser le moins de question possible et penser d’abord à me faire plaisir, fermer les yeux et visualiser de belles images de buts que j’ai marqués ».

Trezeguet : « Prendre chaque match comme une fête. Je pense tactique, je me souviens de tous les conseils techniques du coach. Je me visualise sur le terrain dans les meilleures positions. » Les athlètes n’étant pas réceptif à ce moment, le discours du coach doit être rapide, précis, rappelant les points forts adverses, les points faibles adverses, pour finir sur les points forts de l’équipe (toujours finir sur une note positive). Le coach peut aussi inscrire quelques mots clé sur une feuille : « engagement, discipline, défense.. ».

Consignes

– positivité : « on a bien bossé », « on va gagner », « on est les meilleurs ».

– Mots-clés : « fort », « serein », « combat ».

– Energie : le discours doit être sanglant et énergique et la conclusion forte.

– Rappeler les fondamentaux : « hargne et volonté », « attention au premier quart d’heure ».

– Responsabilité : « tu sais ce que tu dois faire », « qu’est-ce qu’on est venu faire ici ? »

Le discours à la mi-temps.

Premier objectif de la mi-temps est le repos. Le coach ne doit pas intervenir dans un premier temps si ce n’est pour dire de récupérer. Avant le retour sur le terrain, il doit a nouveau rappeler l’essentiel, répéter les actions principales à faire, recadrer, replacer, et proposer des solutions techniques et tactiques.

Le discours pendant le match.

Il doit intervenir le moins possible. Les gestes peuvent remplacer les mots : poings fermés pour dire « allez », signe de tête pour dire de continuer..L’objectif est de signifier au joueur qu’il est bien là derrière lui pour le soutenir. Le joueur en match n’a pas les ressources pour tout enregistrer et modifier : les consignes doivent donc être courtes et précises. Il doit avant tout transmettre une confiance dans les capacités de l’athlètes à vaincre. L’attitude du coach : calme, motivé, serein, volontaire, digne. Le rôle du coach est de maintenir l’équilibre nerveux entre tension et tranquillité, élevant l’une ou l’autre selon les moments du match, le comportement des joueurs.

Le discours d’après match.

Intervention immédiate dans les vestiaires. Une première analyse de la performance doit être effectuée. En cas de défaite, le coach ne doit pas laisser repartir chez soi l’athlète avec le sentiment de frustration ou de déception. En s’associant aux joueurs et en partageant la responsabilité de la défaite (on a perdu), le coach permet ainsi de tirer de suite les conséquences et de passer à autre chose. Il résume alors ce qui a été négatif puis positif, ce qui a manqué à l’équipe puis ce qu’à maîtriser l’équipe pour toujours finir sur un point positif. En cas de victoire, il est important de laisser exprimer sa joie. Il pourra s’abstenir de discours mais le réalisera alors le lendemain. Si la vérité reste le résultat, surtout à haut niveau, le coach doit faire en sorte de ne pas juger la partie par rapport au résultat, mais d’évaluer les différents aspects. Le coach peut aussi questionner les joueurs et demander leurs points de vue respectifs. Cette perspective permet à chaque athlète de s’engager pour travailler et s’améliorer. Certains entraîneurs comme Raymond Domenech instaurent un debriefing. Chacun, individuellement, devant l’ensemble du groupe exprime ses ressentis, sa prestation, sa part de responsabilité dans le résultat.

Les exemples de communication d’Aimé Jacquet lors du mondial de football en 1998 en sont de bons exemples. Extrait de l’ouvrage « PNL et performance sportive, un mental pour gagner » de Antoni Girod, Ed Amphora, 1999.

– Avant le match contre l’Italie : « Il faut être solide. Il ne faut pas lâcher (..) Vieri, il faut le fixer, ne jamais le laisser dans l’intervalle. Ne soyez pas tétanisés par l’évènement, on est très serein. Mais là, dans le match, il faudra tout mettre ». On peut noter omniprésence du « il faut », qui renvoie à la mission supérieure que s’est fixée Aimé Jacquet pour l’équipe de France et qu’il communique avec un puissant enthousiasme aux joueurs en alternant systématiquement le registre de la recherche de l’objectif : « être solide», « fixer », « tout mettre, et le registre de ce qu’il faut éviter, fuir comme comportement : « ne pas lâcher », « ne jamais le laisser »,« ne soyez pas tétanisés ».

– Extrait de la mi-temps France- Croatie. « Ou on monte tous d’un bloc ou on recul d’un cran. C’est comme vous voulez. Ou on réagit et on y va parce qu’il y a une finale au bout ou vous laissez tomber, vous attendez qu’on jette la pièce en l’air. Vous avez peur ? De quoi ? Vous avez peur d qui ? Vous avez peur, et bien vous allez perdre les gars, Vous allez perdre. » Les propos sont durs, le ton tranchant, la gestuelle autoritaire. Face à l’attitude globalement passive de l’équipe qui s’enferme dans un jeu attentiste, la seule solution pour Aimé Jacquet et de susciter une réaction, de faire basculer l’équipe vers une attitude réactive.

Le « c’est comme vous voulez » est là pour créer un engagement volontaire de chaque joueur. L’alternative « ou on réagit, ou vous attendez » met tout le monde au pied du mur. La question « Vous avez peur » vise à atteindre chacun dans son amour- propre. Les mots d’Aimé Jacquet agissent comme des ressorts pour amener les joueurs à prendre la décision intérieure de réagir. D’ailleurs la réaction de Didier Deschamps ne se fait pas attendre. Le capitaine Didier Deschamps s’adresse presque aussitôt à ses co-équipiers : « Il faut y aller. Il faut qu’on réagisse ! Il faut aller les chercher ! C’est à la baïonnette ! »

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