Incontinence urinaire : musculation et rééducation

Travailler ses abdominaux

Travailler ses abdominaux reste une bonne prévention pour les troubles de la statique pelvienne

Que l’on pratique une activité physique ou que l’on soit sédentaire l’incontinence urinaire peut provenir d’un déséquilibre de la sangle abdomino pelvienne l’objectif de cet article est de mieux comprendre la prise en charge globale

 

Auteurs de l’article :

– Docteur  Popineau Christophe,Hopital d’Helfaut, médecin du sport au C.R.E.P.S de Wattignies et membre de l’IRBMS.

– Paulo Fernandes Carlos, médecin généraliste.

Article extrait de la thèse de médecine, «présentation de concepts de physiothérapie selon trois discipline : les étirements, la musculation et l’endurance. Applications médicales et sportives».

Thèse soutenue par Mr Paulo Fernandes et dirigée par le Docteur Popineau.

 

L’objectif des abdominaux hypopressifs est d’éviter essentiellement les troubles de la statique pelvienne chez la femme (prolapsus, incontinence urinaire d’effort…). Pour cela, toute femme sportive doit prendre conscience d’un travail préventif ou curatif au niveau du plancher pelvien.

La périnéologie a fait de constant progrès montrant l’intérêt d’un travail couplé des abdominaux et des muscles du périnée. Nous prendrons l’exemple fréquent de l’incontinence urinaire d’effort chez la femme.

Les facteurs de risques de l’incontinence urinaire

Les facteurs de risque de l’incontinence urinaire d’effort chez la femme sont [14 ;15] :

  • le sport (de haut niveau essentiellement),
  • l’accouchement,
  • la constipation,
  • le vieillissement (fragilité des tissus constitutionnelle ou acquise, perte de la tonicité).

Le sport est un facteur de risque de l’incontinence urinaire, certaines études montrent un nombre de femmes sportives important présentant une incontinence urinaire d’effort (IUE), ceci est cité dans l’ouvrage de Madelenat P et coll. [16], étude qui également est reprise dans la thèse de médecine de Payot-Podevin C (p 46) [14] sur les pathologies des femmes sportives dont nous reproduisons le tableau :

Sport et incontinence urinaire, d’ après Madelenat P et coll .[16].

Sport et incontinence urinaire (selon l’étude de Niyjaard et coll. en 1990)
Sport pratiqué Nombre de sportives Nombre de cas d’incont. d’urine
Course à pied 99 38 (38%)
Body Building de haut niveau 94 34 (36%)
Tennis 37 10 (27%)
Marche 164 34 (21%)
Golf 38 7 (18%)
Cyclisme 81 13 (16%)
Natation 87 10 (12%)
Lancement de poids 54 4 (7%)

L’étude de Elleuch MH, Ghattassi I et coll. en 1998 [15] retrouvent des taux de « …62,8 % de femmes sportives ayant déclaré une IUE le plus souvent peu gênante à la pratique du sports et 60% une IUE à la vie quotidienne… (p 479) contre… 34% d’IUE à la vie quotidienne de femmes témoins non sportives…p 480 » à propos d’une enquête épidémiologique sur 105 femmes sportives nullipares versus 105 femmes non sportives.

Ils poursuivent plus loin en précisant les symptômes de l’IUE : « …Cependant, dans 96 % des cas, il s’agit de perte d’urines minimes et occasionnelles (n’obligeant pas les sportives à se protéger systématiquement pendant l’effort). Les pertes importantes habituelles ne représentent que 4 % des cas (nécessitant un port systématique d’un moyen de protection).Dans notre étude, 7 % des sportives présentent une pollakiurie, 44,6 % une impériosité et 32, 3 % une urgence mictionnelle…p 480 ».

Il y a trois raisons physiopathologiques à ceci :

  • une hyperpression habituelle du caisson abdominal dans de nombreux sports, quin’est pas contre-balancée par une gymnastique périnéale,
  • une hyperlaxité des ligaments pelvi-périnéaux (suite à la gymnastique),
  • une perte de tonicité et de contractilité du plancher pelvien.

Place de la musculation et de la rééducation dans l’incontinence urinaire

Le traitement rééducatif de l’incontinence urinaire présente plusieurs volets possibles [17 ; 18].

Un traitement rééducatif classique de type Kegel du plancherpelvien en complément du travail des abdominaux. Ce traitement fut développé par Kegel en 1948. La technique de Kegel fut développée ensuite avec d’autres techniques (électrostimulation et biofeedback). Ce traitement rééducatif classique comporte plusieurs phases possibles avec un renforcement des muscles élévateurs de l’anus par des exercices actifs de contraction et une lutte contre l’inversion de commande périnéale (c’est-à-dire la tendance à contracter les abdominaux et à relâcher les muscles du périnée) en réalisant la manoeuvre de l’APCA (Anticipation Périnéale de la Contraction Abdominale).

Un traitement par l’electrostimulation, c’est un traitement passif non-douloureux, il aide à la prise en compte du schéma corporel.

Le bio-feedback, Il consiste en la visualisation sur écran des contractions du plancher pelvien.

D’autres types de traitements peuvent s’ajouter (comportemental, pharmacologique, neurologique…).

Le traitement pharmacologique par la prise médicamenteuse d’anticholinergiques pour réduire la contractilité du muscle détrusor. Par d’autres médicaments à l’étude comme les substances alpha-stimulantes pour augmenter le tonus du sphincter urétral, des traitements hormonaux substitutifs, ou de la desmopressine par voie nasale ou orale.

Un traitement chirurgical existe maintenant sous anesthésie locale comme le TVT (tension-free vaginal tape) ou le TVO (trans-obturator tape).

Autres traitements comme la neuromodulation, sphincter artificiel…

Une méthode de santé doit prendre en compte ces données sur le périnée de la femme.

En matière de méthode de musculation, une prise de conscience commence à émerger. En effet il existe d’une récente déclinaison en version féminine de la méthode « protéo-system » élaborée par Lafay O où un petit chapitre (chap.I page 34) évoque le périnée [19]. D’autres méthodes plus anciennes abordent le périnée comme la méthode Pilates. Il existe ainsi des tentatives de couplage de la méthode classique de Kegel avec le Pilates. Ceci est décrit dans l’ouvrage « La méthode Pilates pour les nuls » (chap. 16, page 286) [20].

La conclusion de l’étude de Sengler J et coll. [21] des mesures de pression sur la vessie lors des abdominaux et les efforts de toux est la suivante :

«…il faut impérativement s’assurer (ou obtenir au préalable) d’un excellent verrouillage périnéal à l’effort…p 148 ». Ce sujet est tabou chez beaucoup de femmes, aussi il faut les informer d’une prise en charge possible, tout au
moins pour réduire les symptômes.

Nous pouvons en conclure que le travail de la région périnéale est aussi important que le travail de la sangle abdominale chez la femme sportive ou non. Elle devra consulter pour sa prise en charge rééducative.

Bibliographie

Musculation, ses effets sur les pathologies chroniques Auteurs des articles : Docteur Popineau Christophe,Hopital d’Helfaut, médecin du sport au C.R.E.P.S de Wattignies et membre de l’IRBMS. – Paulo Fernandes Carlos, médecin généraliste. Article extrait de la thèse de médecine, « présentation de concepts de physiothérapie selon trois discipline : les étirements, la musculation et l’endurance. Applications médicales et sportives ». Thèse soutenue par Mr Paulo Fernandes et dirigée par le Docteur Popineau.

 

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  3. BONNEFOY M Sarcopénie, fonction musculaire et prévention. Nutrition clinique et métabolisme, 2004, n° 18, pp 175-180.
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  9. MALLIOPOULOS X, THEVENON A Analyse de l’évolution de la densité minérale osseuse d’un groupe de patients ostéoporotiques pratiquant une séance hebdomadaire d’aquagym. Annales de réadaptation et de médecine physique, sept 1999, n° 42, p 384.
  10. DELARUE YOHANN Facteurs de risques de l’arthrose Douleurs, 2005, 6, 1, cahier 2, pp 1s4- 1s6
  11. RANNOU F, POIRAUDEAU S et coll. Le cartilage : de la mécanobiologie au traitement physique. Annales Réadaptation Médecine Physique, 2001, n °44, pp 259-267.
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  26. RENAULT A Musculation « facteur de santé ». Cinésiologie, 2006, 45ème année, n° 225, pp 116-117. 27 – GAIN H, HERVE J-M, HIGNET R, DESLANDES R Renforcement musculaire en rééducation. Encycl Méd Chir, Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation, 2003, 26-055-A-11, 10 p
  27. GAIN H, HERVE J-M, HIGNET R, DESLANDES R Renforcement musculaire en rééducation. Encycl Méd Chir, Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation, 2003, 26-055-A-11, 10 p

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