Protocole PEACE & LOVE : une prise en charge novatrice de l’entorse de cheville
L’entorse de cheville est l’accident sportif et de mobilité active le plus courant, avec près de 6 000 cas par jour Heureusement, les cas bénins prédominent avec une immobilisation relative ne dépassant pas 8 jours.
1. Phase aiguë de l’entorse dans les premières minutes ou ne dépassant pas les 24 heures : le protocole PEACE
Le protocole PEACE donne les bons réflexes à adopter juste après le traumatisme, dès l’apparition de la douleur, du gonflement ou d’une difficulté à poser le pied au sol.
Cas particuliers d’alerte médicale
-
- Gonflement de l’avant-pied
- Présence d’une plaie
- Déformation du membre inférieur : perte de l’axe entre le pied et la jambe
- Signe de Thomson positif
- Cluster positif suspectant le syndrome de la syndesmose
P (Protection) : Réduire les contraintes mécaniques et de mobilité sur la cheville atteinte sans immobiliser totalement. C’est à dire porter une chevillière et marcher avec appui partiel pendant quelques jours. ( L’application de froid peut aussi être bénéfique)
E (Élévation) : Surélever la jambe blessée (coté de l’entorse de cheville) au-dessus du niveau du cœur permet de limiter le gonflement. On peut pendant le trajet vers chez soi surélever plusieurs fois de suite la jambe.
A (anti-inflammatories) : Contrairement aux idées reçues, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (comme l’ibuprofène), cela est connu depuis de nombreuses années mais il y a débat sur l’usage prolongé de glace qui peut perturber les mécanismes naturels de réparation. Mieux vaut opter pour du paracétamol si la douleur est importante.
C (Compression) : Un bandage ou strapping bien ajusté limite l’œdème et stabilise l’articulation. Attention de ne pas faire un effet garrot.
E (Éducation) : Le sportif doit être informé que la douleur initiale est normale, qu’une radio n’est pas toujours nécessaire et que la reprise du mouvement est bénéfique. Être acteur de sa récupération, c’est éviter la surmédicalisation. Si besoin, demander conseil à son médecin qui appliquera les recommandations de la HAS
L’application de froid ou cryothérapie est un moyen efficace toujours conseillé dans le cadre des techniques de prise en charge de toutes les blessures chez le sportif ou la personne pratiquant une activité physique. L’effet antalgique et anti-œdémateux (gonflement) est reconnu comme une réalité de ce fait sans remettre en cause le protocole évoqué ci dessus on peut utiliser le “P” de protection pour y ajouter le froid en option. Utilisation du froid ou cryothérapie en médecine du sport
2. Phase de rééducation : le protocole LOVE (après 3 à 5 jours)
Une fois la phase aiguë passée, on passe à l’action avec le protocole LOVE, qui valorise la récupération active.
L (Load) : Reprendre doucement l’appui sur la cheville favorise la régénération des lésions et ainsi accélérer la récupération. De ce fait, selon la gravité, on évitera la pose d’un plâtre.
O (Optimism) : La confiance dans le processus de guérison influence directement le rétablissement. Un kinésithérapeute peut par son expérience aider en proposant les limitations de mobilités et en assurant des soins de physiothérapie
V (Vascularisation) : Stimuler la circulation sanguine sans douleur est essentiel. Le vélo d’appartement ou la natation sans poussée excessive sont souvent autorisés dès les premiers jours suivant la phase aiguë. On peut aussi effectuer du drainage ou des stimulations électriques
E (Exercise) : La rééducation doit inclure des exercices de mobilité, de renforcement musculaire et surtout de proprioception (exercices d’équilibre). Travailler sur un coussin instable, faire des montées sur pointe de pied ou pratiquer des mouvements contrôlés permet de retrouver une cheville fonctionnelle.
Focus
Selon le docteur Alexis THIOUNN, membre du collège chirurgical de l’IRBMS : Pour guider la prise en charge de ces entorses notamment l’indication de réaliser ou non une radiographie de la cheville et/ou du pied des critères ont été définis et sont utilisés depuis de nombreuses années : les critères d’OTTAWA.
https://www.irbms.com/prevention-entorse-cheville-apres-convalescence
3. Exemples pratiques selon la gravité
Recommandations 2025 de la Haute Autorité de Santé (H.A.S) Prise en charge entorses latérales de la cheville : Diagnostic, rééducation et retour à la pratique sportive
4. Rééducation spécialisée et prévention des instabilités chroniques
Phase de récupération : Le kinésithérapeute joue un rôle clé dans la récupération
Progressive en fonction des douleurs, d’abord avec attelle puis sans :
- Mobilisation en flexion/extension puis rotations si pas trop de douleur.
- Marche lente avec déroulé du pas complet en gardant la plante du pied au sol au milieu du pas, en pliant les genoux, dans l’axe puis en pas chassé.
- Se mettre sur la pointe des pieds plusieurs fois de suite en respectant la douleur.
- Exercice unipodal proche d’un obstacle haut pour se rattraper si besoin : yeux ouverts, fermés, puis jeux de lancé/rattrapé de balle sur terrain stable puis instable (coussin).
- Saut/réception sur les 2 pieds puis seulement le pied blessé.
- Il est recommandé d’évaluer l’équilibre postural statique et dynamique
5. Reprise du sport
La reprise dépend de la gravité de l’entorse, du sport pratiqué et de la qualité de la rééducation :
- Marche sans douleur : 1 à 3 semaines.
- Reprise de la course : 3 à 6 semaines.
- Sports avec pivot (foot, handball, rugby) : entre 6 semaines et 3 mois.
Le retour au sport se fait toujours avec prudence. Certains sportifs utilisent temporairement une chevillière ou un strapping pour se rassurer, surtout en terrain instable.
6. Complications possibles
Une prise en charge incomplète ou une reprise trop précoce peuvent entraîner :
- Une instabilité chronique : la cheville « lâche » souvent, notamment en terrain irrégulier.
- Une arthrose précoce : si la structure articulaire a été abîmée.
- Des douleurs persistantes : parfois liées à des lésions osseuses ou ligamentaires non diagnostiquées.
- Un blocage psychologique : peur de se reblesser, frein à la reprise du sport.
- Une algodystrophie
7. Imagerie médicale
Pas toujours nécessaire lors de l’accident. Il est recommandé d’utiliser les critères d’Ottawa pour exclure la probabilité de fractures ou déplacements. Echographie et autres imageries selon les complications rencontrées
Conclusion
Le protocole PEACE & LOVE n’est pas un simple traitement, mais une stratégie complète et personnalisée de prise en charge des entorses.
Il encourage à :
- Traiter l’entorse sans excès de passivité ou au contraire d’excès de médicalisation
- Retrouver son statut d’ actif dès que possible.
- Miser sur la rééducation fonctionnelle et la proprioception
- Prévenir les récidives plutôt que de les subir et surtout éviter l’évolution lente vers l’arthrose et l’indication de prothèse de cheville
En cas d’entorse, gardez votre calme, consultez un médecin ou un kinésithérapeute sans forcement encombrer les urgences sauf si suspicion de gravité (fracture, plaie )
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